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Les paroles de la chanson
« La belle abbesse »
Juliette

Ben, quoi? Vous n’avez donc jamais rien vu
Ou c’est-y que vous m’ reluquez l’ corsage?
Allez, les manants, laissez-moi l’ passage
Et pour la bagatelle on est d’ la r’vue
J’ les sens, vos r’gards plantés dans mon dos
Mais moi, d’ ce quartier j’ suis aborigène
Ça m’ donne bien l’ droit d’avoir mon sans-gêne
Ça m’ donne bien l’ droit, l’ droit d’être un rien crado
C’est vrai, c’ matin, je m’ suis même pas lavée
Je m’ suis juste remis un peu d’ bleu et d’ rose
Juste pour maquiller quelques ecchymoses
Qu’ la nuit dernière un salaud m’a gravées
Je m’ suis pas brossé les chicots non plus
Tiens, pour faire comme si, redonne-moi une bière
Qu’est-ce que vous dites vous, là-bas, la rombière?
Reculez-vous si vous trouvez que j’ pue!

{Refrain:}
Parce qu’y faudrait pas croire
Que pass’ que vous m’ voyez
Accoudée là et sans adresse
A’ec tout mon foutoir
Débordant de mes paniers
Que je n’ suis rien qu’une drôlesse
Nageant dans sa bière et sa graisse
Une simple épave des bas-quartiers
Non! Messieurs, vous devez saluer
L’impératrice
L’archiduchesse
La belle-en-cuisse
La belle abbesse
Celle qui passe comme une déesse
Provocatrice
Enchanteresse
Et qui crache sur votre pitié

Encore un p’tit dernier et pis salut!
Y faut que j’ reparte vers ces rues en pente
Que depuis toujours j’inspecte et j’arpente
Comme si j’y cherchais un trésor perdu
Mais y a pas d’ trésor, y a que d’ la chiennerie
Des rentiers hargneux et des vilains mômes
Qui s’ foutent de ma gueule bouffie d’hématomes
Et des accrocs béants dans ma lingerie
La nuit, j’ suis divine, au rouge des néons
Fraîche comme les œillets chourés au cimetière
Que j’ revends pour l’ prix d’une rasade de bière
Aux travestis d’ la rue Germain-Pilon
La nuit, c’est là qu’il y a de foutues clartés
Quand un jeune clodo me prend pour une pute
Ferme les yeux, m’enlace, enfin me culbute
Et me laisse heureuse et jambes écartées

{au Refrain}

T’es qui toi d’abord qui s’ dit mon ami,
Un voyeur ou bien un d’ ces ethnologues
Qui voudrait m’ fourrer dans son catalogue?
Eh ben, je vais p’t-être te répondre, tiens, j’ai besoin d’un demi
C’était y a longtemps... Et pis non, j’ sais plus
J’ préfère la fermer, rester illusoire
N’être qu’une légende des plus provisoires
Un tag effacé dès qu’il aura plu
Une honte qui passe, un cauchemar vécu
Une tête de guignol battant la breloque
Un épouvantail que le vent déloque
Un instant montrant son cœur et son cul