Les paroles de la chanson
« Eloge des vaudois »
Michel Bühler
Il arrive qu’à l’étranger
- Oui, je m’y risque, oui, j’y vais -
Vu le léger accent qu’est le mien
On me demande d’où je viens
A quoi je réponds "Mais Madame
Je suis Suisse de cœur et d’âme
On se presse de loin pour venir voir
Mes biscotos de montagnard"
Alors la dame... ou le monsieur
Qu’importe, prend un air malicieux
Et puis condescendant déclare
Avec une sorte d’accent savoyard
"Les banques et les montres, je vois,
Le fromage, le chocolat
Le Cervin, Genève et Zurich
Vous avez de la chance, vous êtes riches!"
Que ces clichés sont éculés
Qui nous mettent tous dans le même panier
Du Léman au lac de Constance
Sans subtilité, sans nuances
Alors que vingt peuples se partagent
La douceur de nos paysages
Entre les Alpes et le Jura
Moi par exemple, je suis Vaudois
C’est dire que je n’ai rien à voir
Avec le Genevois bavard
Le Neuchâtelois minutieux
Ou le Valaisan tête en feu
Rien à voir, mais c’est évident,
Avec nos cousins suisse-allemands
Je ne dirai rien à leur propos
Et rien, c’est déjà presque trop
Le Vaudois, ah, c’est un taiseux
Il pense beaucoup mais parle peu
Il a trois principes : Méfiance
Méfiance ensuite et puis... méfiance
Soucieux de ne choquer personne
Il pèse ses mots et ça donne
Pour dire un non franc, affirmé,
Un très délicat "Vous croyez?"
Offrez-lui un plat dégueulasse
Genre tripes confites à la mélasse
Pour marquer son dégoût total
Il murmurera "C’est spécial!"
Peu d’emphase donc peu de lyrisme
Sauf chez certains politiciens
Tel celui qui voulait, nom d’un chien,
Mettre un frein à l’immobilisme
Si l’on connaît peu le Vaudois
De par le monde c’est, ma foi,
Qu’il est avant tout réservé
Et peu porté à s’imposer
Discret, il vit dans son canton
Jolies collines et frais vallons
Vignes en pentes et beaux vergers
Soucieux de ne pas déranger
Exemple : Deux Vaudois pêcheurs
Sont sur le lac de bonne heure
On est heureux, on est comblé
Dans l’eau un litron prend le frais
Quand tout à coup le vent se lève
Et les pousse loin de la grève
Les vagues se creusent profondes
La pluie cogne, le tonnerre gronde
La barque est prête à chavirer
Leur dernière heure va sonner
"On pourrait peut-être prier?"
A quoi l’autre, agrippé au bord
Rétorque en un ultime effort
"Est-ce que tu crois vraiment
Que c’est le moment de se faire remarquer?"
Ennemi de la démesure
Fuyant le risque, l’aventure
Le Vaudois type, pur et dur
Vote à l’extrême centre, bien sûr,
En tout il reste raisonnable
Même pour le vin, même pour la table
D’accord, il y a des exceptions
J’en connais, je peux te donner des noms
L’est pas avare mais prudent
Jamais orgueilleux mais conscient
L’a le gaspillage en horreur
Tenez... nos deux de tout à l’heure
Sauvés, séchés, rev’nus sur terre
Se remettent avec quelques verres
A la terrasse d’un café
En haut d’une côte escarpée
Arrive un cycliste suant
Soufflant, en nage, écumant
Il demande une bouteille d’eau
Qu’il engloutit tout aussitôt
Puis une autre et une autre enfin
Il paie et disparaît au loin
Les deux se r’gardent abasourdis
"Une si belle soif, mais quel gâchis!"
Sauf pour commander trois déci
On dit le Vaudois indécis
C’est vrai, réservant son avis
Il dira ouais plutôt que oui
Mais quand après mûre réflexion
Il s’est forgé une opinion
Son verdict tombe sans appel
Définitif et officiel
Nos deux Vaudois sont au bistro
Silence, personne ne pipe mot
On entend voler une abeille
Au bar la serveuse sommeille
Arrive alors un type curieux
"Belle journée, bonjour ces messieurs
Un café s’il vous plait mam’zelle
Et pis l’ journal pour les nouvelles!"
Le gars s’installe, se met à l’aise
Dans leur coin, les Vaudois se taisent
Une demi-heure coule au clocher
Pas une parole n’est prononcée
Puis l’ gars s’en va "Merci au revoir!"
Alors l’un de nos deux gaillards
Hoche la tête "Enfin parti
C’tte grande gueule!" "Ouais, tu l’as dit!"
C’est ainsi que l’on est ici
Dans ce pays tendre, béni
Qu’on pourrait dire de cocagne
Entre le lac et les montagnes
Où, dans les années d’abondance,
Les épis de blé sont si denses
Si gros, si pesants sous les cieux
Que les champs plient en leur milieu
Où l’on a vu dans ces temps-là
Des patates d’un tel format
Qu’avec une seule on pouvait faire
Des röstis pour l’armée entière
Où le brouillard parfois descend
Lourd et tellement consistant
Qu’ les oiseaux pour se déplacer
Se voient contraints d’aller à pied
Où le soleil quand il se montre
Est si ardent, si enjoué
Qu’il fait monter dans nos gosiers
Des soifs qu’on peut s’appuyer contre
C’est ainsi qu’on est et qu’on reste
Pas fiers, honnêtes, travailleurs
Simples, bref, parmi les meilleurs
En un mot, Vaudois et modestes
C’ qui suffit bien à not’ bonheur
- Oui, je m’y risque, oui, j’y vais -
Vu le léger accent qu’est le mien
On me demande d’où je viens
A quoi je réponds "Mais Madame
Je suis Suisse de cœur et d’âme
On se presse de loin pour venir voir
Mes biscotos de montagnard"
Alors la dame... ou le monsieur
Qu’importe, prend un air malicieux
Et puis condescendant déclare
Avec une sorte d’accent savoyard
"Les banques et les montres, je vois,
Le fromage, le chocolat
Le Cervin, Genève et Zurich
Vous avez de la chance, vous êtes riches!"
Que ces clichés sont éculés
Qui nous mettent tous dans le même panier
Du Léman au lac de Constance
Sans subtilité, sans nuances
Alors que vingt peuples se partagent
La douceur de nos paysages
Entre les Alpes et le Jura
Moi par exemple, je suis Vaudois
C’est dire que je n’ai rien à voir
Avec le Genevois bavard
Le Neuchâtelois minutieux
Ou le Valaisan tête en feu
Rien à voir, mais c’est évident,
Avec nos cousins suisse-allemands
Je ne dirai rien à leur propos
Et rien, c’est déjà presque trop
Le Vaudois, ah, c’est un taiseux
Il pense beaucoup mais parle peu
Il a trois principes : Méfiance
Méfiance ensuite et puis... méfiance
Soucieux de ne choquer personne
Il pèse ses mots et ça donne
Pour dire un non franc, affirmé,
Un très délicat "Vous croyez?"
Offrez-lui un plat dégueulasse
Genre tripes confites à la mélasse
Pour marquer son dégoût total
Il murmurera "C’est spécial!"
Peu d’emphase donc peu de lyrisme
Sauf chez certains politiciens
Tel celui qui voulait, nom d’un chien,
Mettre un frein à l’immobilisme
Si l’on connaît peu le Vaudois
De par le monde c’est, ma foi,
Qu’il est avant tout réservé
Et peu porté à s’imposer
Discret, il vit dans son canton
Jolies collines et frais vallons
Vignes en pentes et beaux vergers
Soucieux de ne pas déranger
Exemple : Deux Vaudois pêcheurs
Sont sur le lac de bonne heure
On est heureux, on est comblé
Dans l’eau un litron prend le frais
Quand tout à coup le vent se lève
Et les pousse loin de la grève
Les vagues se creusent profondes
La pluie cogne, le tonnerre gronde
La barque est prête à chavirer
Leur dernière heure va sonner
"On pourrait peut-être prier?"
A quoi l’autre, agrippé au bord
Rétorque en un ultime effort
"Est-ce que tu crois vraiment
Que c’est le moment de se faire remarquer?"
Ennemi de la démesure
Fuyant le risque, l’aventure
Le Vaudois type, pur et dur
Vote à l’extrême centre, bien sûr,
En tout il reste raisonnable
Même pour le vin, même pour la table
D’accord, il y a des exceptions
J’en connais, je peux te donner des noms
L’est pas avare mais prudent
Jamais orgueilleux mais conscient
L’a le gaspillage en horreur
Tenez... nos deux de tout à l’heure
Sauvés, séchés, rev’nus sur terre
Se remettent avec quelques verres
A la terrasse d’un café
En haut d’une côte escarpée
Arrive un cycliste suant
Soufflant, en nage, écumant
Il demande une bouteille d’eau
Qu’il engloutit tout aussitôt
Puis une autre et une autre enfin
Il paie et disparaît au loin
Les deux se r’gardent abasourdis
"Une si belle soif, mais quel gâchis!"
Sauf pour commander trois déci
On dit le Vaudois indécis
C’est vrai, réservant son avis
Il dira ouais plutôt que oui
Mais quand après mûre réflexion
Il s’est forgé une opinion
Son verdict tombe sans appel
Définitif et officiel
Nos deux Vaudois sont au bistro
Silence, personne ne pipe mot
On entend voler une abeille
Au bar la serveuse sommeille
Arrive alors un type curieux
"Belle journée, bonjour ces messieurs
Un café s’il vous plait mam’zelle
Et pis l’ journal pour les nouvelles!"
Le gars s’installe, se met à l’aise
Dans leur coin, les Vaudois se taisent
Une demi-heure coule au clocher
Pas une parole n’est prononcée
Puis l’ gars s’en va "Merci au revoir!"
Alors l’un de nos deux gaillards
Hoche la tête "Enfin parti
C’tte grande gueule!" "Ouais, tu l’as dit!"
C’est ainsi que l’on est ici
Dans ce pays tendre, béni
Qu’on pourrait dire de cocagne
Entre le lac et les montagnes
Où, dans les années d’abondance,
Les épis de blé sont si denses
Si gros, si pesants sous les cieux
Que les champs plient en leur milieu
Où l’on a vu dans ces temps-là
Des patates d’un tel format
Qu’avec une seule on pouvait faire
Des röstis pour l’armée entière
Où le brouillard parfois descend
Lourd et tellement consistant
Qu’ les oiseaux pour se déplacer
Se voient contraints d’aller à pied
Où le soleil quand il se montre
Est si ardent, si enjoué
Qu’il fait monter dans nos gosiers
Des soifs qu’on peut s’appuyer contre
C’est ainsi qu’on est et qu’on reste
Pas fiers, honnêtes, travailleurs
Simples, bref, parmi les meilleurs
En un mot, Vaudois et modestes
C’ qui suffit bien à not’ bonheur